Vous avez lu les dernières enquêtes publiées à l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer, ce 4 février 2025 ? Elles pointent une augmentation des cancers chez les sujets jeunes : en France, 15 000 patients de 20 à 40 ans ont été touchés par un cancer en 2022. L’étude publiée en décembre 2024 dans The Lancet Oncology révèle que les cancers devraient augmenter de 12% dans le monde chez les 15-39 ans d’ici 2050.
S’exprimant à l’occasion de cette journée, le professeur marseillais de cancérologie Fabrice Barlési – il dirige désormais le plus grand centre de lutte contre le cancer en Europe, l’Institut Gustave Roussy à Paris – a dit redouter carrément pour les jeunes un « tsunami auquel il faut se préparer« . Notamment concernant les cancers digestifs.
Le coeur des ados pompe moins bien
Cette tranche d’âge gagnée par le cancer, c’est justement celle que notre association M24 essaie de sensibiliser à modifier son hygiène de vie. Et c’était l’objectif de la conférence organisée justement ce 4 février au sein du lycée Edmond Rostand, implanté juste en face du stade Orange-Vélodrome. La cheffe d’établissement Murielle Guiot-Bourg et la prof d’EPS Gaëlle Loussouarn ont fait appel à nos experts pour informer deux classes d’élèves se destinant aux carrières médico-sociales.

En défricheur, le docteur Hervé Collado, vice-président de M24 et spécialiste de médecine du sport. Il se montre très inquiet. « Par rapport à il y a 30 ans, votre génération a perdu entre 25% et 30% de capacités cardiovasculaires. Votre coeur, votre pompe, fonctionne 30% en moins et n’envoie pas suffisamment de sang vers vos organes. C’est énorme ! »
« Vos artères se bouchent »
La raison principale de cette baisse alarmante de la santé des jeunes Français, c’est bien sûr la sédentarité d’une génération scotchée aux écrans plutôt qu’aux selles de vélo. « Si l’on ajoute l’alimentation ultra transformée et trop riche en gras et en sucre, cela entraîne des maladies. »
Ce discours simple sans être simpliste interpelle les élèves. Le Dr Collado les interroge : quelles sont ces maladies ? Les mains se lèvent : « Le diabète ! » « L’obésité ! » « Les cancers. » « Le cholestérol ». « Il y a aussi les TMS Monsieur ! » Est également évoquée l’hypertension artérielle que les jeunes ne connaissent pas. Une redoutable tueuse silencieuse. « Et vous savez ce que tout ceci entraîne ? lance le médecin. La mort. Car cela bouche les artères et provoque des infarctus, abîme vos organes. Votre génération vivra sans doute moins longtemps que celle de vos parents.«
« Venez à l’école à pied ! »
Alors que faire ? « A votre âge, une heure d’activité physique est recommandée chaque jour. Monter les escaliers, venir à l’école à pied plutôt qu’en bus, ça compte aussi. Faites du sport le week-end. Mais en réalité, on sait que les jours où vous n’avez pas école, vous bougez deux fois moins. » Satanés écrans !
Enseignant en EPS, Sylvain Carle constate la baisse de forme généralisée de ses élèves, qui s’est accentuée depuis environ cinq ans. Ils courent moins vite et moins longtemps. Il déplore également qu’à 15 ans trop d’élèves soient en surpoids.

Le fast-food voisin se frotte les mains
Un sondage effectué dans leur établissement par les lycéens avant cette conférence a obtenu 124 réponses. Plus d’un élève sur deux déclare ne faire que rarement du sport en dehors des cours obligatoires d’EPS. En contrepoint, ils se nourrissent souvent assez mal. D’ailleurs le fast-food voisin du lycée se frotte les mains.
L’alimentation ultra transformée et bourrée de sucre et de mauvais gras, c’est l’autre levier sur lequel il est possible d’agir pour améliorer la santé des ados. A condition de leur fournir des explications chiffrées. C’est la bataille conduite par la nutritionniste Cécile Capdeville, qui s’est arraché les cheveux à la lecture des autres éléments du sondage : 56% des élèves ne prennent pas de petit-déjeuner devant apporter 25% à 30% des apports caloriques de la journée. Surtout quand on va à l’école et que le cerveau réclame de l’énergie après une nuit de sommeil.
« Buvez de l’eau, fuyez les sodas »
« Vous dîtes que vous préférez dormir plutôt que prendre le temps de manger ? Ce n’est pas une bonne solution. » Il suffit de quelques minutes pour manger idéalement une ou deux tartines et un laitage, un fruit si possible sans oublier de boire de l’eau ou du jus de fruits mais composé de 100% de fruits pressés.
Et le goûter ? « Je le recommande, souligne l’experte. Il doit apporter 10% des apports caloriques. » Là encore, méfiez-vous des biscuits industriels. Préférez le pain avec du chocolat, une banane ou une pomme ou un laitage. « Et buvez de l’eau ! C’est la seule boisson indispensable à notre organisme. Tout le reste est superflu. »
Oui au hamburger… exceptionnellement !
Cécile Capdeville invite les élèves à ne pas manger au fast-food « sauf de manière exceptionnelle« . Or plus de 60% des 124 ados interrogés affirment y déjeuner « une à deux fois par semaine. » « Certains y déjeunent tous les jours » se désole la directrice.
« Bien sûr, c’est bon de manger un hamburger, c’est un plaisir que j’aime moi aussi. Mais seulement de temps en temps. Vous savez que les nuggets contiennent moins de 50% de poulet? ajoute la nutritionniste. Le reste, c’est de la peau ! » Beurk généralisé dans l’assistance… Malheureusement les enfants ne reçoivent jamais ce genre d’informations très concrètes.
Des additifs qui favorisent le cancer
Elle les incite encore à fuir les sodas pleins d’additifs et de sucre caché. Mais 1 élève sur 3 de ce lycée consomme du soda tous les jours et 1 sur 2 « de temps en temps ». Soit 84% !
« Et les sodas light, c’est mieux Madame, non ? » « Bonne question ! Eh bien non. » Prenant une célèbre marque de cola, la nutritionniste déroule sa composition : E150D, c’est du caramel au sulfite d’ammonium soupçonné d’être cancérigène: E951 : c’est de l’aspartame, un additif neurotoxique notamment. Une cannette contient l’équivalent de 7 morceaux de sucre. « Buvez de l’eau !«
Le wrap bourré de mauvaises calories
Elle projette devant les regards surpris un tableau sur les apports caloriques. Un Big Mac : 509 calories; un wrap poulet-bacon : 609 calories. Une frite moyenne : 341 calories. Et le pompon, c’est que c’est cher et qu’on en ressort avec la faim au ventre quand on est en pleine croissance à 16 ans. Une salade Caesar, c’est seulement 152 calories.
30 questions et 90 minutes plus tard, les élèves repartent en cours. Les graines ont été semées dans les esprits. C’est que veut croire Murielle Guiot-Bourg. « Ils vont réfléchir à ce qu’ils ont entendu et seront peut-être plus attentifs à ce qu’ils mangent« . Attentifs aussi à lâcher un peu leurs écrans ? Le message est passé. On peut toujours rêver ! Surtout si les parents se réveillent à leur tour et s’interrogent également sur leurs pratiques…